La bouteille artistique de Corneille, madeleine de Proust de Vitalie Taittinger

La première fois que je l'ai vue, elle se trouvait aux archives. Je n'en connaissais pas l'existence et cette bouteille m'a de suite émue. Cette œuvre d'art m'a rappelé beaucoup de choses, beaucoup de moments de mon enfance», se remémore Vitalie Taittinger, directrice Marketing et Communication, qui a rejoint son père, en 2007, lorsqu'il rachète la maison Taittinger, afin de pérenniser l'esprit familial de la maison. Et, c'est, cette année-là encore, qu'elle découvre ainsi le millésime 1990 mis en valeur par l'artiste Cornelis Van Beverloo, dit Corneille: le 8e flacon de la Taittinger Collection.

Des oiseaux sous fond de liberté et de gaieté

Artiste accompli: peintre, mais aussi sculpteur, graveur et céramiste, «Corneille a réalisé son œuvre à la gouache essentiellement, ce qui fait que cette bouteille est très fragile», détaille Vitalie Taittinger. Sur un fond vert comme les feuilles de vignes champenoises, des oiseaux aux formes étranges ont été dessinés, symboles de Liberté et de l'Esprit. D'après le descriptif de l'œuvre: «Ces oiseaux sont prêts à s'envoler, s'affranchissant des barrières, des frontières, porteurs comme le vin qu'ils incarnent d'un message universel de gaieté».

L'art et le champagne, deux univers qui se complètent

La Taittinger collection a été créée par Claude Taittinger, en 1983. Il a obtenu la participation de quelques-uns des plus grandes signatures contemporaines de l'art pour une mise en valeur des millésimes remarquables de la Maison. «La bouteille devient à la fois support et champ d'inspiration pour une création», commente Vitalie Taitting, diplômée de l'école de dessin Emile Cohl, où elle a appris les techniques de l'illustration et du graphisme. «C'est peut-être la Taittinger Collection qui me relie le plus naturellement au champagne Taittinger. Depuis que je suis toute petite, j'ai toujours été élevée dans l'Art: ma grand-mère, Corinne Deville est artiste, mon arrière-grand-père et arrière-grand-mère l'étaient également. Chez ma grand-mère, il y avait un univers assez fort, particulier, énormément de vert et de rouge. Elle faisait une peinture, pas naïve mais, finalement, son expression artistique pouvait être proche de l'univers de Corneille.» Pour cette jeune femme d'alors qui pensait avoir une voie toute tracée dans l'univers de l'Art: «Quand je suis tombée sur cette bouteille, je me suis dit que c'était assez drôle d'arriver dans le monde du champagne que je croyais très différent et de trouver une bouteille sur laquelle un artiste avait peint. J'ai trouvé que c'était une belle façon de voir aussi le champagne.»

Treize éditions aussi prestigieuses que rares

L'artiste hongrois Vasarely fut le premier contributeur. La collection a été enrichie au fil des éditions par André Masson, Roy Lichtenstein, Imaï, Rauschenberg ou encore Amadou Sow. En 2016, le dernier flacon a avoir accueilli une œuvre est celle du photographe franco-brésilien Sebastiao Salgado. Des bouteilles tirées en édition limitée (5 à 7000). La Taittinger collection ne compte, pour l'heure, que 13éditions, aussi prestigieuses que rares. Quelques-uns des prototypes sont actuellement exposés dans le circuit de visites. L'artiste choisi a, à chaque fois, carte blanche. «Sa seule contrainte, c'est la bouteille. On choisit des hommes et des femmes qui ont marqué par leur écriture l'histoire de l'Art. C'est une œuvre assez sage.» Comme un peintre, un chef de cave, une famille dessinent des cuvées en assemblant des nuances de terroirs, d'années «Cette collection raconte bien la philosophie de la maison, poursuit Vitalie Taittinger. Cette idée finalement qu'une grande maison de Champagne, avec un patrimoine de vignes assez conséquent puisqu'il y a 280 hectares, c'est une maison qui raconte des histoires, une maison qui en assemblant ses raisins parvient à une écriture qui lui est propre. Ce qui m'a touché, c'est que, comme un peintre, un chef de cave, une famille dessinent des cuvées en assemblant des nuances de terroir, d'années. Claude Taittinger voulait que l'on se positionne plus en tant qu'artiste ou artisan: une vision que je trouve très juste par rapport à la maison Taittinger.» Aurélie Beaussart